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désolé, j’ai pas eu le temps.

j’aimerais bien, mais je vais pas avoir le temps là.

'’On n’a pas le temps’’ / ‘‘J’ai pas eu le temps’’ : combien de fois j’ai entendu ces petites phrases. Combien de fois je les ai dites… cette superbe excuse pour ne pas avoir à dire, ni à se dire, qu’en fait, on a fait autre chose. Ce petit mensonge quotidien qu’on fait autant aux autres qu’à soi même, pour ne pas reconnaître qu’en fait qu’on avait des choses plus importantes, qu’on a glandé joyeusement, qu’on a pas réussi à le faire, qu’on n’a jamais vraiment eu envie, qu’on a oublié… la liste est longue.

En n’ayant pas le temps, on se déresponsabilise un peu des choix qu’on a fait1 en rejetant tout sur la faute du temps. C’est pas moi, c’est le temps. Il y en a pas assez.

Parce que la vérité, c’est que le temps, on l’a eu. Les deux jours pour nettoyer ce bout de code qui traîne depuis des mois, les 15 minutes pour passer à la poste dans la semaine, prendre quelques jours de congés au cours des deux dernières années… Alors que le temps, il était là. Il est passé, pareil pour tout le monde. Mais on en a fait autre chose2. On a eu le temps, mais on ne l’a pas pris.

On a placé ses priorités ailleurs, que ce soit consciemment ou non. Combien de fois j’ai entendu : ‘‘« on n’a pas le temps de faire du code propre de qualité, il y a des fonctionnalités à faire »’’3 alors qu’en fait la réalité c’est ‘‘« on a fait le choix de faire un grand nombre de fonctionnalités qui marcheront peut être plutôt que de n’en faire que quelques unes fiables »’’. Le temps n’y est pour rien dans l’histoire, c’est un choix qui a été fait.

Il y a deux ou trois ans, j’ai arrêté de dire ‘‘« j’ai pas eu le temps »’’ pour le remplacer par ‘‘« je n’ai pas pris le temps »’’4. Ça peut paraître un petit chipotage de plus sur les mots, mais ça change beaucoup de choses :

  • j’ai pas eu le temps : ok, c’est la faute du temps, c’est comme ça, il n’y en a pas assez. Je ne peux rien faire là dessus. Affaire classée.
  • je n’ai pas pris le temps : ah, intéressant. J’ai fait quoi d’autre pendant ce temps là ? Pourquoi ? Est-ce un choix ou est-ce que je me suis laissé porter ? Ce que je n’ai pas fait, j’aurai dû le faire ? Où sont mes priorités ? Sont-elles en accord avec mes actes ? Comment je concilie les deux ?

Bref, ça me permet de (me) comprendre5 et de m’améliorer.

Évidement, en aucun cas l’objectif n’est de chercher à me justifier. Au contraire, ça me permet d’assumer mes choix, ou mes non-choix au lieu d’accuser le temps, qui était bien là, mais qui n’y est pour rien.

Et vous, quand est-ce que vous arrêtez de ne plus avoir le temps ? et surtout, quand est-ce que vous commencer à prendre le temps ?

– un grand merci à Nicolas, Antoine, Olivier et Nathalie pour les lectures attentives.

  1. ou des non choix qu’on n’a pas fait 

  2. cette autre chose pouvant être de glandouiller joyeusement :) 

  3. encore ce matin, qui motive l’achèvement de ce billet qui traînait depuis quelques temps. :) 

  4. qui a, en plus, le bon goût d’être syntaxiquement correct (le négation sans ne, ça m’agace :) 

  5. ou pas, je ne prétends pas être rationnel dans mes (non-)choix :)